HARRIS Sam (né en 1967)

 

Philosophe et spécialiste des neurosciences américain, diplômé d'Harvard, il est une des figures de pointe de la lutte antireligieuse dans le monde contemporain, dénonçant le danger que représentent à la fois pour la personne humaine et pour la sécurité du monde les religions, dans des ouvrages comme The End of Faith (2004) et Letter To a Christian Nation (2006). Il proclame au nom de l'honnêteté intellectuelle un devoir d'intolérance à l'égard des croyances religieuses.

The End of Faith (La Fin de la foi) est un remarquable réquisitoire antireligieux. La religion, remarque Harris, reste le seul domaine tabou actuel : il est permis de critiquer les opinions politiques et scientifiques d'un individu, mais pas ses opinions religieuses, et lorsqu'un attentat terroriste est commis par un musulman, la dimension religieuse de son geste est escamotée au profit d'une explication socio-économique. Dans tous les autres domaines de la culture et de l'action on demande à la personne de justifier ses opinions et ses actes, au nom de la raison, alors que les opinions religieuses « peuvent flotter librement hors de toute raison et de toute preuve ». Jésus né d'une vierge, mi-homme, mi-dieu, mort, ressuscité, monté au ciel, « peut maintenant être mangé sous la forme d'un biscuit ».

Quelques mots de latin sur votre bourgogne préféré vous permettent aussi boire son sang. Si une personne seule affirmait cela, est-ce qu'on ne la considérerait pas comme folle ? Mais non, croyances absurdes sont dites respectables. Mais si cela peut consoler ? Qu'importe alors que ces croyances soient vraies ou fausses ? Argument irrecevable : c'est justement la vérité de la doctrine qui est l'objet de la foi. Admettre que ces croyances peuvent être fausses, c'est les détruire ; ce n'est pas parce qu'elles consolent qu'elles sont vraies.

Mais elles ont motivé la conduire admirable de saints personnages, qui se sont dévoués pour les autres, de saint François à Mère Teresa. Réponse: à l'époque du premier, comme tout le monde était croyant ceux qui se dévouaient étaient nécessairement des croyants ! Et à l'époque de la seconde, il y a bien des exemples d'athées admirables : « On peut risquer sa vie pour sauver les autres sans croire des absurdités sur la nature de l'univers. »

Il n'y a pas de religion réellement modérée

 

 

Sam Harris dénonce la dangereuse illusion qui consiste à distinguer les croyants « modérés », qui seraient respectables, et les « extrémistes », qui seraient condamnables. D'abord, les modérés ou « libéraux » sont des croyants qui n'ont pas vraiment lu la Bible ou le Coran, ou qui en laissent délibérément de côté tout ce qui contredit la morale consensuelle; ils ne citent que les « bons » passages et ne retiennent que les « bons » côtés. Il ne faut pourtant pas chercher bien loin dans le Deutéronome par exemple pour trouver des appels au meurtre des infidèles: « Vous devez les tuer, … vous devez les lapider à mort » (Deut.,13,7-11), et pas question de s'esquiver : « Quoi que je vous commande maintenant, vous devez l'observer, n'ajoutant rien, ne retirant rien. »

 

La Bible et le Coran contiennent de multiple passages de ce genre, soigneusement occultés par les croyants « modérés », ou alors relativisés, allégorisés, ce que n'acceptent pas les « extrémistes », cohérents avec la notion de textes « révélés », En acceptant cette idée de révélation divine,« les croyants modérés sont largement responsables des conflits religieux dans le monde, parce que leurs croyances créent un contexte dans lequel on ne peut pas opposer de réponse adéquate au littéralisme et à la violence religieuse ».

 

De toute façon, poursuit Sam Harris, la fraction des modérés ne l'emporte que lorsque leur religion est en situation de faiblesse. Dès que les religieux détiennent le pouvoir, ils imposent un régime totalitaire visant à éliminer les infidèles. Cela est vrai du christianisme comme de l'islam. Il faut vraiment être de mauvaise foi pour affirmer sans rougir que ce dernier est une « religion de paix ». Une lecture honnête du Coran devrait suffire à se persuader du contraire. Sam Harris cite des dizaines de passages qui sont des appels directs à la persécution et au meurtre des infidèles, et il conclut : « Presque à chaque page le Coran demande au fidèle musulman de mépriser les incroyants. Presque à chaque page, il prépare le terrain pour les conflits religieux. Ceux qui lisent les passages comme ceux que nous avons cités et qui ne voient pas de lien entre la foi musulmane et la violence musulmane devraient sans doute consulter un neurologiste. L'islam, plus que toute autre religion inventée par les hommes, a toutes les caractéristiques d'un culte de la mort. »

 

L'islam, dit-on, a favorisé l'essor d'une brillante civilisation. Or, on constate au contraire que cet essor a été brisé à partir du moment où les religieux ont étouffé la réflexion philosophique rationnelle. La persécution dont Averroès a été victime marque le début de la stagnation du monde arabe-musulman, à la fin du XIIe siècle. Seule la science éclairée par la raison peut fournir une base éthique au développement humain. Et Sam Harris conclut ironiquement : « La foi est sans doute le chef d' œuvre du diable ».

Bibliographie: Sam Harris, The End of Faith. Religion, Terror, and the Future of Reason, 2004.

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