MES coups de cœurs

Quelques films et documents formidables récemment découverts, que je place au plus haut niveau, bonheur, espoir, menaces !

et Kaurismäki, le dernier auteur génial du cinéma !

 

Désobéissantes !

Après un été 2018 marqué par la canicule, les incendies et la démission fracassante de Nicolas Hulot, un groupe de jeunes gens, affolé par l'inaction des gouvernements face à la crise climatique, décide d'unir ses forces. Un QG, La Base, est loué en plein Paris. En germe depuis la COP21, une internationale informelle du climat relie différents mouvements de contestation européens : Extinction Rebellion, Ende Gelände, Alternatiba, ANV-COP21. Après une première victoire – la pétition baptisée L'Affaire du siècle et ses deux millions de signatures en quinze jours – les activistes de La Base organisent cent trente-quatre décrochages de portraits d'Emmanuel Macron dans les mairies. C'est leur première grande action de désobéissance civile.
 Ecouter l'interview d'Adèle Flaux accordé à France Culture le 19 novembre 2020 à propos du film Désobéissant.e.s !
Adèle Flaux et Alizée Chappini sont deux cinéastes françaises. En 2014, Adèle Flaux participe au film d'OvidieÀ quoi rêvent les jeunes filles ? puis réalise avec Marion Guégan Avortement, le prix à payer, en 2020. Alizée Chappini a travaillé sur le film Tiananmen (2019) de Ian MacMillan.
Découvrez une sélection de films traitant du sujet de la désobéissance civile disponibles en DVD dans les médiathèques de Villeurbanne.

Voir le film  (1h21)

Vincent Munier, éternel émerveillé

C'est l'une des rares personnes capables de tisser un lien entre l’homme et la vie sauvage. Le "pape" de la photographie animalière nous transmet, avec une subtilité qui lui est propre, ses émotions les plus intimes. Mais Vincent Munier en est convaincu : montrer la beauté du monde ne suffit plus. C'est un choc, une sorte de révolution culturelle que nous devons désormais opérer si nous voulons préserver – pour ne pas dire sauver – le monde que nous laisserons à nos enfants.

Photographe animalier, Vincent Munier a grandi dans les Vosges où son père, fervent naturaliste, l’a initié à l’art de la patience, de l’affût et de la prise de vue. Un livre et une parution ont contribué à le faire connaître du grand public en 2018. D’abord, la sélection de son travail dans l’album de fin d’année qu’a fait paraître l’association Reporters sans frontières. Puis, Tibet : minéral animal, sur les traces de la panthère des neiges avec l’inévitable Sylvain Tesson.

Le film documentaire brosse le portrait d’un fou de nature plus qu’un féru de technique : « Plus jeune, j’ai traîné dans des associations de photographes animaliers, c’est dingue comment le moindre collectif peut tenter de vous formater ! La photo, ça doit être comme ça, avec une netteté impeccable comme ça et le soleil forcément dans le dos, etc. » Le photographe s’est vite affranchi des canons. « Avant de lire les notices de matériel photo, les amateurs qui voudraient passer professionnels devraient déjà parcourir Robert Hainard et Bernard Géroudet» Le premier est naturaliste, le second, ornithologue. Sur un tempo contemplatif, ce film traduit les heures matinales, le froid et l’attente pour parvenir à observer l’animal : le pic noir, un cousin du pic vert, le grand tétras, un gallinacé sauvage très menacé, ou le lynx, régulièrement braconné dans les Vosges. Mais le film culmine avec la scène d’une rencontre avec neuf loups arctiques dans le Grand Nord canadien, quand les exclamations du photographe confinent à une sorte de jubilation amoureuse. Télérama.fr, 2020 - Voir le film  (52mn)

La Panthère des neiges est un récit de Sylvain Tesson publié le  aux éditions Gallimard et qui a reçu le prix Renaudot la même année.

Parti à l'affût des dernières panthères des neiges sur les hauts plateaux du Tibet avec le photographe animalier Vincent Munier, l'auteur relate dans son récit de voyage l'approche et les rares apparitions de l'animal en y mêlant ses réflexions sur l'état du monde et son expérience intime de la perte de deux personnes proches que la panthère lui évoque. Ce livre, globalement bien accueilli par la critique littéraire, remporte la première place au palmarès 2019 des meilleures ventes de livres francophones en librairies.

Mika Kaurismäki. Voir son dernier ITV (4mn34)
 

Facteur, plongeur de restaurant et critique de film avant de se lancer dans la réalisation cinématographique, Aki Kaurismäki réalise le documentaire The Saimaa Gesture, son premier film, en 1981. Une œuvre qu'il produit également, en collaboration avec son frère Mika (réalisateur entre autres d'I Love L. A. en 1998). C'est le début d'une longue collaboration, qui pousse Aki et Mika Kaurismäki à réaliser et financer pas moins du cinquième de la production assurée en Finlande depuis le début des années 80.
Metteur en scène d'une vingtaine de films en autant d'années, Aki Kaurismäki impose sa marque de fabrique dès Ariel (1988) : un mélange de comédie déjantée et de drame désespéré, peut-être hérité de son penchant notoire pour la bouteille. Un mélange auquel le cinéaste ajoute le rêve américain avec Leningrad Cow-boys go America, avant de plonger dans la noirceur de La Fille aux allumettes (1989).
Le début des années 90 voit le cinéaste s'exiler en Grande-Bretagne puis en France, où il réalise respectivement J'ai engagé un tueur (1990) et La Vie de bohème (1992) avec notamment Jean-Pierre Léaud. Un an plus tard, il donne une suite à Leningrad Cowboys Go America : Les Leningrad Cow-Boys rencontrent Moise.
Retour à des sujets plus sérieux avec Tiens ton foulard, Tatiana (1994), et surtout avec Au loin s'en vont les nuages, très ancré dans le quotidien avec son couple touché par le chômage et vainqueur du Prix œcuménique au Festival de Cannes 1996, où il était présenté en compétition. 1999 signe son détour par le cinéma quasi-expérimental avec Juha, film muet en noir et blanc, hommage aux mélodrames flamboyants de Douglas Sirk.
Aki Kaurismäki attire encore une fois l'attention du festival de Cannes en 2002, avec L' Homme sans passé. Cette œuvre représente sa plus grande consécration internationale, remportant le Grand Prix et le Prix d'interprétation féminine, en plus d'être nominé à l'Oscar de meilleur film étranger. Ce prix d'interprétation confirme entre autres le succès du partenariat entre le réalisateur et celle qui est devenue son actrice fétiche, Kati Outinen, ayant tourné dans plus de dix films du cinéaste.
Après une absence de cinq ans (si l'on enlève son rôle savoureux dans Aaltra), le cinéaste signe son retour en 2006 avec Les Lumières du faubourg, projeté à Cannes en compétition officielle. Ce film sur la solitude clôt donc la "trilogie des perdants" entamée avec Au loin s'en vont les nuages et L' Homme sans passé. Après une participation dans le film collectif Chacun son cinéma (2007), il revient en France pour tourner Le Havre, chronique sociale douce-amère portée par Kati OutinenAndré Wilms et Jean-Pierre Darroussin.

 

 

les plus grand visionnaires de l'histoire

 

George Orwell et Aldous Huxley, 1984 ou le meilleur des mondes

Le film raconte l’histoire croisée de George Orwell et d’Aldous Huxley, les auteurs des deux grands romans d’anticipation fondateurs : 1984 et Le meilleur des mondes. Écrits il y a plus de 70 ans, ces deux romans trouvent un écho extraordinaire dans nos sociétés d’aujourd’hui : fake news, ultra-surveillance, recherche du bébé parfait, régulation des masses par la culture du plaisir.

Il est amusant de souligner que les deux écrivains anglais Aldous Huxley et George Orwell se croisèrent au très chic collège d’Eton en 1917. Cette année-là, Huxley, le dandy parfait, enseigna le français au jeune Eric Blair, le vrai nom d’Orwell, élève boursier, modeste et désabusé. En 1932, Huxley publiait Le Meilleur des mondes, et dix-sept ans plus tard paraissait 1984, signé Orwell. Le premier imaginait une fable sur le contrôle ultime par le plaisir dans une société consumériste et eugéniste. Le second envisageait son fameux « Big Brother » dans un régime totalitaire où chacun était surveillé minute par minute. On sait que les deux hommes se lisaient et ne partageaient pas la même vision du monde et de la littérature. Mais ce film documentaire passionnant montre à quel point leurs œuvres nous parlent d’aujourd’hui, pointant les manipulations politiques, sociales, linguistiques. Car, en littérature comme sur les réseaux sociaux actuels, la falsification et la perversion du langage sont d’une puissance infinie. "L’ignorance, c’est la force… La guerre, c’est la paix", lit-on dans 1984 à travers son « ministère de la vérité ». Soudain, l’ombre de Donald Trump s’impose lorsqu’il répète à son public extatique, "ce que vous voyez n’est pas la réalité". 

L’écrivain Boualem Sansal, la philosophe Cynthia Fleury analysent superbement cette haute technologie du contrôle, cette société de la carotte et du bâton au temps des caméras de surveillance à reconnaissance faciale et des fake news jetées en pâture. Pas de gagnant évidemment dans cette relecture des œuvres signées par deux génies de l’anticipation, mais une envie de les relire dans la minute. Christine Ferniot, Telerama.fr

Caroline Benarrosh est réalisatrice de films et séries documentaires.  On lui doit Propriétaires mais pauvres ! Les Oubliés de la crise du logement (2011), Duel royal (2015), 13 novembre. Quand la France vacille (2016), L'Histoire secrète de la victoire (2019) et Tu deviendras hétéro mon fils (2020).

Philippe Caldéron est scénariste et réalisateur. Ses films abordent différentes thématiques, en particulier celle du monde animal avec Washoe, le singe qui parle avec les mains (1993), La Cité des fourmis (1999), Mèche Blanche, les aventures du petit castor (2008) ou Bonobos (2010) réalisé par Alain Tixier et dont il a coécrit le scénario. Son œuvre aborde aussi abondamment la philosophie, la littérature et l'histoire. Citons Lorsque le monde parlait arabe : l'âge d'or de l'Islam (2000), Retrouver Byzance (2002) et Michel Foucault par lui-même (2003).  Voir le film  (53 mn)

LA MORT DES LOUPS

La mort des loups" de Léo Ferré explore les thèmes de la mort, de l'oppression sociale et de la complexité des émotions humaines. La chanson juxtapose différents scénarios et symboles pour transmettre son sens. La première partie de la chanson fait référence à deux exécutions qui ont eu lieu en 1973 et 1974, mettant en évidence l'indifférence des dirigeants politiques à l'égard de ces événements. Cela donne le ton aux versets suivants, qui explorent le côté sombre de la société. Ferré dépeint une image des villes la nuit, remplies de maisons d'"amour fou" et de dispositifs automatisés, symbolisant un manque d'humanité et de véritable connexion. Les enfants jouant à être morts dans les ascenseurs et les meurtriers prenant leur temps pour mesurer leurs jours comptés font écho au thème de la mortalité.

 

Le refrain "On ne les voit jamais que lorsqu'on les a pris" suggère que la société ne prête attention à ceux qui sont en difficulté ou confrontés à la mort que lorsqu'il est trop tard. La représentation de ces individus comme des loups enchaînés reflète la perception de leur statut de parias dangereux. Ferré exprime son affection pour ces loups marginalisés, mettant l'accent sur leur vulnérabilité et les cages inventées pour les contrôler. Son admiration suggère une profonde empathie pour ceux qui sont souvent jugés et incompris par la société. Le deuxième couplet de la chanson explore l'attrait de l'évasion et la nature éphémère de l'amour et des relations humaines. Les paroles font allusion à des individus drogués marchant dans le vent et à une paire d'anges blonds tués dans un café, symbolisant la fragilité de la vie et la destructivité de l'addiction.

 

Ferré loue les loups, qui sont la source de perturbation la nuit, car ils réveillent le monde de sa froideur métallique. Il se demande pourquoi la société poursuit ces loups alors qu'ils sont capables d'expérimenter l'amour sans jugement, affranchis des notions de bien et de mal. Les derniers versets décrivent le passage du temps et la nature éphémère des souvenirs. L'image de deux loups, sans tête ni queue, partant dans un panier vers un pays doux où la musique du silence dérange à la fois les humains et les animaux, suggère le royaume de l'au-delà ou un lieu où les disparus sont rappelés.

 

Les souvenirs d'enfance personnels de Ferré de son loup en peluche, qui le réveillait à 5 heures du matin, symbolisent sa connexion avec ces créatures incomprises. Il exprime son amour et sa gratitude envers les loups qui lui ont rendu son propre loup.Dans l'ensemble, "La mort des loups" explore les thèmes de l'oppression sociale, de l'empathie envers les marginalisés et de la nature éphémère de la vie et des relations humaines. C'est une réflexion poignante sur la mortalité et les émotions complexes qui découlent de ces expériences.

Ma vénération pour ce chanteur est sans borne. Ce chant fait vibrer mon cœur au plus haut. J'en ai réalisé un clip.


Regardez le... (9'33)

 

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