33 - GODONCOURT (2 - suite et fin - 1)

 

NOTE DE 1945

  

En me remémorant, un jour d’été de 1929, sur la route de Godoncourt, les avatars professionnels du Hennezel qui portait le nom de ce village, je ne pensais pas trouver plus tard d’autres traces de lui. La découverte fut faite, huit ans  après ma visite à Godoncourt par M. Georges Varlot, toujours attentif à suivre l’histoire de sa famille maternelle, en lisant dans un journal anglais, une étude sur les verreries d’art, il apprit qu’après l’échec de sa glacerie parisienne, le maître verrier lorrain était passé en Hollande. Le renseignement était tiré d’un ouvrage paru en 1906. L’auteur y disait « Jean de Hennezel, écuyer,seigneur de Godoncourt en Vosges, gentilhomme de par Mme la duchesse douairière d'Orléans, fonda en 1661, à Amsterdam sur la rive gauche de la rivière Amstel, une verrerie à glaces et à miroirs. Ce gentilhomme ne fut pas très longtemps maître de cette verrerie, car en 1669, elle fut achetée par un anglais John Bellingham et un hollandais, né Abraham Pieman. (E. van Bierna - 1906).

 

En m’apprenant cette découverte, M. Varlot ajoutait, « on attribue à Jean de Godoncourt plusieurs pièces remarquables, entre autre un verre en cristal taillé en couleurs, fabriqué à l’occasion du mariage du roi Charles II d'Angleterre avec Catherine de Bragance ».

Cette pièce appelée « royal oad goblet » (gobelet en chêne royal) est un grand verre cylindrique, monté sur une tige creuse, dont le pied est finement tressé et ouvragé. Il comporte des médaillons entourés de branches de chêne, dans lesquels se voient les bustes du roi et de la reine. De l’autre coté se trouvent les armes d’Angleterre.

 

Jean de Hennezel ne fut pas le seul de la famille à se qualifier de seigneur de Godoncourt. Au début du XVII° siècle, l’auteur de notre branche d'Ormoy, Christophe II de Grandmont, possédait des fiefs dans ce village. Au printemps de 1602, il avait repris à une cousine de son nom, Claudine de Hennezel, femme d’Humbert du Houx de Belrupt,les terres et seigneuries d'Ormoy et de Grignoncourt qu'avait possédées pendant trois quarts de siècle, la première branche d'Ormoy (avril 1602). A l’automne de la même année, complétant ses acquisitions dans cette région, Christophe achetait à un autre parent, Philibert de Charmoilles, seigneur de Melincourt, ses fiefs de Bousseraucourt, de Corroy et de Godoncourt, seigneuries relevant de la baronnie de Jonvelle. L'acquéreur en fit l’hommage à Dole, entre les mains du comte de Champlitte, gouverneur du comté de Bourgogne (novembre 1602).

 

 IV sommaire

 

Godoncourt

 

Charles Léopold II de Francogney se fixe dans ce village après son mariage - Sa postérité - Le martyre de Godoncourt en 1634 – L’église mutilée et l’ancien cimetière - Le pensionnat - Au nouveau cimetière, sépultures des familles d’Hennezel, Magagnosc, Varlot - Les pains d’anis Jeanne d’Arc - Conversation avec le fabricant - M. et Mme Léon d'Hennezel, fondateurs de la papeterie- Sort de l'usine après leur mort - La belle propriété créée par eux, vendue par leurs filles - Correspondance avec le commandant Magagnosc en 1922 - Situation et importance de la papeterie - Paul et Léon d’Hennezel, soldat et industriel comme leurs ancêtres. 

 

Nous voici en vue du village. Pendant le dernier siècle, trois générations de Hennezel d’une autre branche vécurent sous cet horizon. C'étaient les parents et grands-parents des Francogney de la Pille. L’auteur de cette branche se fixa à Godoncourt à la suite d’un mariage. Il se nommait Charles Léopod II de Francogney, il était l’aîné de la douzaine d’enfants qu’avait eu Charles Léopold 1er, maire de Charmois et dernier maître de la Neuve Verrerie, constructeur dans ce hameau de la grande maison vue au mois de juillet, nous avons relevé le texte de la pierre de fondation, datée de 1809.

Né à la Neuve-Verrerie, Charles Léopold II n’avait que vingt ans, lorsqu il s'éprit d’une jeune fille de Godoncourt Marie Bourguignon, de deux mois seulement plus jeune que lui. D’une famille de cultivateurs et maires du village, Marie avait perdu son père tout enfant. Comment naquit l’idylle entre les jeunes gens. On ne le sait pas. Mais il est certain qu’ils se montraient si amoureux l’un de l'autre que l’on jugea nécessaire de ne pas retarder leur union, malgré leur âge. La cérémonie eut lieu au printemps de 1820. Charles eut pour témoin un oncle paternel et un cousin de Bonnay. Marie bourguignon était assistée de son oncle paternel et de son beau-frère, tous deux propriétaires et cultivateurs à Godoncourt.

Cette alliance n'était peut-être pas très flatteuse pour l’aîné des Francogney. De fait, elle le fixa dans le village. Il devint aussi cultivateur, passa  sa vie à Godoncourt et y mourut un demi-siècle plus tard, après avoir exercé dans sa commune et même aux environs, une heureuse influence. Il fut longtemps maire et conseiller d’arrondissement. En 1849, il fut élu, à la majorité absolue commandant du bataillon de la garde nationale du canton de Monthureux par les dix huit officiers et sous-officiers recrutés dans les communes de Regnevelle, Ameuvelle, Martinvelle, Fignevelle, Godoncourt et Claudon (1843).

 

Deux enfants naquirent de cette union. Charles Léopold III qui devait devenir propriétaire de la Pille après son mariage avec mademoiselle de Beaupré, et une fille qui fut la mère du général du corps d’armée, membre au conseil supérieur de la guerre et d’un inspecteur général des forêts. Depuis cette époque, les registres paroissiaux de Godoncourt relatent une douzaine de naissances, de mariages et de décès concernant la famille.

 

Le village est dominé par son église. Commençons par la visiter en songeant à ces Hennezel.

 

Godoncourt est bâti en amphithéâtre, à la base du flanc nord d’un plateau en culture, le pays semble essentiellement agricole. La route venant de Monthureux se transforme en une très large rue en pénétrant dans le village et aboutit au pied de l’église. On compte ici six ou sept cents âmes.

Nous arrêtons l’auto dans une rue transversale qui coupe Godoncourt d’est en ouest. L’église parait curieuse. Elle est entourée d’un terrain vague, le cimetière désaffecté assez récemment. Quelques monuments, plus ou moins brisés, disparaissent ou s’écroulent dans les broussailles. Cette église est certainement de construction romane, son clocher l’indique, mais elle a terriblement souffert au cours des âges notamment au XVII° siècle, pendant la conquête française, qui amena l’occupation de l’armée suédoise. Godoncourt et sa population endurèrent un véritable martyre.

 

On raconte qu’un jour de mars 1634, l’armée de Weimar fit une irruption dans le village ou s’étaient réfugiés quelques habitants de Monthureux et des paroisses voisines. Cette troupe enferma toutes les femmes dans une maison, sous la garde d’une seule sentinelle. L’une des femmes eut l’audace de se jeter sur le soldat, de le poignarder et de s’enfuir avec ses compagnes. Quand les suédois revinrent, ils tuèrent pour se venger plus de cent quarante habitants et enlevèrent quatre cents têtes de bétail, puis ils mirent le feu au village qui fut entièrement brûlé, sauf une maison.

Affreusement dévastée, l’église n’était qu’une lamentable ruine. Aujourd'hui elle fait l'effet d’un grand mutilé qui a été opéré par un chirurgien maladroit, elle n’a plus guère de forme. La nef, basse et écrasée, est étagée par une quantité de contreforts, aussi massifs que rustiques, on les a multipliés à chaque endroit menaçant de s’écrouler et on les a solidement rejointoyés. Ceux du coté nord surtout, soutenant le portail, sont caractéristiques.

Du même coté, la base d’une tour, coupée à hauteur de la toiture de la nef  et le cadran disproportionné de l’horloge  juché au-dessus d’une baie du clocher prouvent que le monument a été réparé sans souci d’esthétique, peut-être aussi faute de crédits suffisants. Il en est de même du choeur et du transept, ils furent agrandis outre mesure.

Le portail est dans le style jésuite du XVII°siècle. A l’intérieur quelques vitraux anciens, mais dans son ensemble, le mobilier de l’église est modeste. Au point de vue paroissial, Godoncourt dépend de la cure de Monthureux.

A peu de distance de l’église, au sud-est, s’élève un énorme couvent* pensionnat de religieuses, parait-il. Celles-ci devraient s’occuper de l’entretien de ce vénérable monument …il est vrai qu'elles sont cloîtrées et qu'elles doivent avoir une chapelle particulière.

 *Aujourd'hui devenu monastère orthodoxe.

Au sortir de l’église, j’erre un instant dans l’ancien cimetière, peut-être contient-il encore, enfouies dans l'herbe, quelques épitaphes intéressantes… ma recherche est vaine. Une femme, passant dans la rue, est intriguée par ma recherche. J’en profite pour lui demander où se trouve le cimetière actuel et si l’on y a transporté des monuments provenant de celui-ci. Elle me répond tout de suite « le nouveau cimetière, bien sur monsieur qu’il y a des morts qui ont été transportés d'ici. Il est tout en haut du pays, au milieu des champs ». Et elle m’indique, derrière le clocher, une rue qui monte.

Encouragé par cette réponse, je demande à la bonne femme si elle a connu M. Léon Hennezel, fabricant de papier, et où se trouvait sa maison. « Oh oui, monsieur, j’ai bien connu toute la famille. M. d’Hennezel est mort, il y a une vingtaine d’années. Il habitait tout au bout de la rue, c’est la dernière maison à gauche, avant de descendre vers la papeterie. Vous verrez, il y a une grille ». Elle tend la main vers l’est de la rue où est arrêtée l’auto.

Je remercie la brave femme, nous prenons la direction du cimetière, comment passer à Godoncourt, sans faire une prière sur les tombes des Hennezel qui ont vécu dans ce village… au bout de la rue, à droite, l’entrée du pensionnat.

Après quelques centaines de mètres, un mauvais chemin aboutit en plein champ au nouveau cimetière. Il ressemble à un terrain abandonné. C’est le sort de tous les champs de repos, depuis qu’on refoule les morts le plus loin possible des vivants.

En ouvrant le portail, j’aperçois au fond de l’allée centrale, un monument en pierre de taille entouré d’une grille. C'est le caveau où reposent l’ancien fabricant de papier et sa femme. J’y relève cette inscription,

 

Famille d’Hennezel

 

Léonie d'Hennezel

Née Bailly

1846 - 1908

 

Léon d’Hennezel

Son époux

1845 - 1910

 

Il s agit bien des parents de Mmes Varlot et Magagnosc.

 

D’après mes notes, Léon d'Hennezel de Francogney, frère jumeau du commandant était né à Briare (Loiret), où leur père Charles-Léopold III était employé des postes. Sa mère était une Beaupré de la Pille. Il avait épousé à Darney, en 1868 mademoiselle Léonie Bailly, fille d’un banquier de la région et d’une demoiselle Périn, d’une famille de Bains. Mme Léon d'Hennezel mourut à Nancy  deux ans avant son mari (1908 ). Léon d'Hennezel donna une heureuse impulsion à son industrie. Il passa sa vie à Godoncourt, il en fut longtemps le maire, la popularité dont il jouissait dans le canton de Monthureux l’amena en 1886 à poser sa candidature au conseil général, mais ce fut son concurrent, un autre industriel, M. André Bresson, filateur à Monthureux, qui obtint la majorité.

 

A gauche du monument se trouve la tombe de la mère du colonel Magagnosc, morte sans doute à Godoncourt chez sa belle-fille. Le tombeau porte, au-dessous d une croix en relief, cette inscription,

 

Famille Magagnosc-d'Hennezel

Ci-gît

Thérèse Magagnosc

Née Azemar

25 avril 1837

17 octobre 1926

 

 Priez pour elle

 

La seconde fille de M. Léon d'Hennezel s’est mariée à Godoncourt le 2 août 1897. Les parents de son mari se nommaient Mathieu Magagnosc et Thérèse-Marie-Céline Azemar, noms bien provençaux.

En faisant le tour du cimetière, je découvre contre le mur de gauche, deux  monuments cote à cote. Ce sont de modestes socles de pierre de taille, surmontes d’une croix de fer forgée, assez joliment ouvragée. De petites dalles, envahies par les hautes herbes, précèdent des monuments, elles recouvrent les restes de défunts qu’on a exhumés lors de la suppression du cimetière de l’église. Le socle du monument de droite porte cette épitaphe.

                                                                                                                   

Charles d’Hennezel

Décèdé le 2 février 1869

A l'âge de 70 ans

 

Priez pour lui

 

Il s’agit de Charles Léopold II de Francogney. Après son mariage avec mademoiselle Bourguignon, il se fixa à Godoncourt et mourut dans ce village. Le socle de l’autre monument porte simplement le nom du défunt.

 

Charles Léopold d’Hennezel

1820 – 1902

 

Cette tombe recouvre les restes de Charles Léopold III de Francogney époux d’Amélie de Beaupré de la Pille et père du commandant d’Hennezel et de son frère l’industriel.

Ce gentilhomme naquit à Godoncourt à l’automne de 1820. Il entra dans l’administration des postes et télégraphes en 1844 et commença sa carrière à Orléans. Au bout d’une dizaine d’années, il obtint de se rapprocher du pays natal, en 1855, il fut nommé receveur du bureau de Monthureux. Il y resta vingt ans, heureux de vivre près de Godoncourt et de la Pille. C’est dans cette ville qu’il atteignit l'âge de la retraite en 1875. Il fut nommé maire, conseiller d’arrondissement et lieutenant de louveterie. Mme d’Hennezel mourut à la Pille en 1881, nous avons vu sa tombe au cimetière de Viomenil.

Après le décès de sa femme, Charles Léopold habita la Pille encore quelques années, avec une nièce non mariée nommée Marie. Celle-ci mourut en 1893. Il revint ensuite chez son fils Léon et partagea sa vie entre la Pille où la chasse l’attirait toujours et Godoncourt. Il s’éteignit ici en 1902 dans un âge avancé. Son corps fut inhumé sous un monument qui recouvrait les restes de ses grands-parents maternels. Voici le texte de leur épitaphe.

 

Ci-gît

Jean Vaulot ancien maire

Agé de 59 ans époux de Marie Elisabecthe Empereure

Décédé le 1er décembre 1836

 

Le nom de Vaulot est bien connu dans la région. Un Vaulot maître de forges à Selles, fut député des Vosges sous la restauration.

 

Ne quittons pas Godoncourt sans faire l’acquisition de quelques cartes postales, elles compléteront mes photographies. J’entre dans une boutique et me trouve chez un fabricant de curieux petits gâteaux, des « pains d’anis » spécialité locale. Nous en avons vu de semblables à Remiremont, sous les arcades de la grande rue. Ceux-ci portent le nom de Jeanne d'Arc. « Ils sont renommés, nos pains d’anis, me dit le marchand, vous pouvez les goûter, monsieur ». Tout d’abord cet étrange gâteau parait insignifiant, mais il a un parfum spécial, on y prend goût, j’en achète une grosse boite qui porte le nom du fabricant, Haret. Ce souvenir gastronomique de Godoncourt et de...Jeanne d’Arc sera amusant à consommer à Bourguignon à l’heure du thé.

Le marchand a l’air satisfait du succès de ses gâteaux, j’en profite pour entamer la conversation. Je lui dis l’objet de ma venue à Godoncourt et me nomme.

- « ah, me dit-il, vous êtes de la famille d’Hennezel qui a été si longtemps ici... »

Je réponds que j’en suis un parent très éloigné mais que m’intéressant beaucoup aux souvenirs de famille, je viens du cimetière et m’apprête à voir la maison et l’ancienne papeterie de M. Léon d’Hennezel. Je demande,

- « l’usine marche-t-elle toujours ?

- « oui monsieur, répond-il, mais après la mort de M. d’Hennezel il y a eu des changements. Il aurait eu de la peine s’il avait su tout ce qu il s’est passé depuis et Mme d’Hennezel aussi. Je les ai connus tous les deux ».

Je pousse mon enquête.

- « c'est bien eux qui avaient crée la papeterie ? »

Il me répond.

- « oui monsieur, c’était une belle usine. Il n’y avait là-bas dans le temps qu’un moulin. Après son mariage -il y a plus de soixante ans bien sur - M. d’Hennezel amena ici le matériel d’une cartonnerie que possédait son beau-père. Il mit la papeterie en route. Malheureusement, quelques années plus tard, il y eut un incendie. M. d’Hennezel ne se découragea pas. Sa femme était riche et aussi capable que lui. Alors, ils ont construit les bâtiments de la papeterie qui existent toujours, avec un matériel moderne. Comme ils étaient tous deux, compétents et actifs, l’affaire prospéra très bien ».

Je poursuis.

- « ils habitaient le village ? »

- « non monsieur, ils habitaient dans une maison à coté de l’usine, c’est là qu’eurent lieu les noces de leurs deux demoiselles avec des officiers. Après le mariage, M. d’Hennezel a fait bâtir au bout de Godoncourt, en haut de la côte, une belle maison pour loger toute la famille. Vous la verrez en descendant à la papeterie. M. d’Hennezel est mort trop tôt, il n’avait guère que soixante et quelques années, il était encore actif, mais depuis le décès de Mme d’Hennezel  deux ans auparavant, il n'était plus le même homme. Après sa mort la famille a voulu continuer la fabrication. C’était M. Varlot, son gendre qui dirigea l’usine. Ce monsieur fut aussi maire de la commune. C’était un homme dévoué pour tout le monde, mais la papeterie ce n'était pas bien son affaire. Cependant, il avait deux jeunes gens qui travaillaient pour être ingénieurs et auraient sans doute repris l’affaire. Malheureusement, la guerre est arrivée. M. Varlot n’a pas voulu être mobilisé sur place. Comme il était capitaine, il a rejoint son régiment. Après la guerre, ces messieurs ont vu qu’il y aurait bien des dépenses à faire pour remettre en route la papeterie arrêtée si longtemps. Alors ils ont vendu l’usine vers 1920 et ont continué à habiter la maison de M. d’Hennezel encore pendant quelques années ».

- « et l'usine, dis-je, a-t-elle recommencé à marché ? »

- « oui monsieur, la société Navarre qui l’avait achetée la fait fonctionner encore, mais ça va bien doucement ».

Je réponds.

- « cela ne m'étonne pas, il y a en ce moment dans toute la France, une crise sur les papeteries ».

Et profitant de ce que le marchand est en confiance, je lui demande s’il y a longtemps que Mmes Varlot et Magagnosc n’habitent plus Godoncourt.

- « il y a trois ou quatre ans monsieur, me répond-il, ces dames ont vendu la maison de leurs parents. Mme Varlot est allée s’installer à Bleurville, et sa soeur a été habiter dans la Meuse près de sa fille, on dit qu elles ont gardé en commun le château de la pille ».

- « c’est vrai, lui dis-je, je connais Mme Magagnosc. L’année dernière nous avons déjeuné chez elle à la Pille et ces jours-ci, nous devons aller voir les Varlot à Bleurville ».

Ma petite enquête terminée, nous quittons le marchand dans les meilleurs termes. Je lui promets de rester son client.

Je tins parole, ses pains seront si appréciés qu’en 1930, je lui en ferai expédier une autre grande boite à Bourguignon. Mais quand j’en redemanderai, deux ans plus tard, M. Haret me répondra qu’il n’en fabrique plus. Il avait du cesser à cause de la concurrence. Il y avait donc à Godoncourt, crise sur les pains d’anis, comme sur la papeterie... celle-ci ne fonctionne plus depuis 1930.

 

Il nous reste à voir la maison où s’éteignirent ici ces Hennezel et la fameuse usine, mise en oeuvre si longtemps par le dernier d’entre eux.

Remontés vers l’église, nous prenons vers l’ouest la rue indiquée par la bonne femme. A son extrémité, une maison bourgeoise à la façade perpendiculaire au chemin, regarde l’est. La construction est soignée mais sans prétention. M. et Mme d’Hennezel ont voulu avoir avant tout, une habitation pratique et agréable. La maison est peu élevée, à un étage, avec de petites fenêtres presque carrées, cela doit rendre le logis plus facile à chauffer dans ce climat rude. Les fenêtres du second sont en attique. La cour d’entrée surélevée en forme de terrasse est séparée du chemin par un mur en briques surmonté d’une grille. De là, la vue s’étend sur la vallée de la Saône. L’autre façade de l’habitation comporte un pavillon assez large, bâti en retour d’équerre et dont la toiture est ornée de bois découpé qui lui donne l’aspect d un chalet.

 

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